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Un Swiss Jazz Orchestra pour une Création Mondiale

Publié le 03.06.2025

Le 12 juin le saxophoniste suisse Christoph Irniger présentera une oeuvre en création mondiale à l'Alhambra, dans le cadre du festival Les Athénéennes.

Christoph Irniger est un musicien présent sur la scène jazz suisse et inernationale. Il s’est formé à la pédagogie à la Jazzschule de Zürich et la performance à la Musikhochschule de Lucerne.

Ancien membre du Lucerne Jazz Orchestra, il se produit désormais au sein de formations qu’il a fondées, comme Pilgrim ou le Christoph Irniger trio. Il joue également avec des artistes comme Dave Douglas, Dan Weiss, Stefan Rusconi, Vera Kappeler ou Marc Perrenoud.

Invité au festival Les Athénéennes avec le Swiss Jazz Orchestra, il évoque sa nouvelle création, Driving - Suite pour voix, vibraphone et Big Band, à découvrir à la Grande Salle de l'Alhambra, le 12 juin prochain.

Rencontre



Votre pièce Driving est une commande des Athénéennes, que vous avez composée pour le Swiss Jazz Orchestra. Qu’est-ce que cela change par rapport à vos compositions habituelles?

J’ai plutôt l’habitude de composer pour des petites formations, effectivement. C’est seulement la deuxième fois que je compose pour un big band, mais je ne dirais pas que c’est plus difficile. Le plus dur - dans toutes mes compositions - est d’avoir l’idée principale.

En tant que compositeur, je travaille toujours en rassemblant des idées que je collecte au cours de ma vie; je prends des notes de tout. Donc, quand il s'agit vraiment du processus de composition, je me plonge dans mes archives, et j’utilise des fragments issus de ma banque d’idées; je ne pars jamais de zéro. C’est une habitude de travail que j'ai développée.



Combien de temps vous faut-il pour terminer une telle pièce?

C’est généralement relativement rapide. Jusqu’à mi-février ou mars, je ne savais pas encore par quoi commencer. Et puis j'ai eu l'idée, et tout s'est mis en place rapidement. L’œuvre devait être terminée pour fin mai, donc je m’y suis consacré à 100%. Ce fut une période intense, mais je n’avais que très peu de concerts à ce moment-là, pour pouvoir me laisser du temps pour l’écriture.

Je n’aime pas travailler à la dernière minute, il me fallait une marge de sécurité de deux semaines, au cas où.

Pour un orchestre classique, cette marge serait assez restreinte. Est-ce différent pour un orchestre de jazz?

Avec mon groupe Pilgrim ou mon trio, nous répétons quand nous avons une tournée. Nous faisons généralement une ou deux répétitions avant, puis nous commençons à jouer.

Nous sommes tous des musiciens professionnels, capables de prendre les partitions, les travailler et en répétition, les pièces sonnent très bien assez vite.
Les orchestres professionnels n’ont qu’une répétition en moyenne, il faut être efficaces. Pour cette création aux Athénéennes, en revanche, nous avons trois répétitions; c’est un luxe! Je ne peux qu’être ravi.





Le processus de composition et répétition est peut-être aussi allégé grâce aux parties improvisées?

Il est vrai que la pièce comporte des parties improvisées. J’essaie d’avoir une hiérarchie assez plate dans l’orchestre, pour que tout le monde ait un solo et que je n’aie pas toujours le rôle de leader.

Pourquoi votre pièce est-elle titrée Driving?

Je me suis évidemment inspiré du thème du festival : Eros & Thanatos. En faisant mes recherches, j’ai trouvé un livre où Sigmund Freud décrivait Eros & Thanatos comme le principal conflit intérieur de l'humanité. Ce sont les deux pulsions, les deux principaux instincts qui nous poussent à vivre. Thanatos est l'instinct de mort et Eros est le désir de survivre, de créer, d'être créatif et d'aimer.

C'est le désir de vivre parce que demain pourrait ne pas exister. J'ai réfléchi à ce qui me m’anime et aux moments où je ressens ces conflits qui me "conduisent". Cela a mené à l'idée de faire une suite structurée en quatre parties, qui décrivent quatre étapes différentes de la vie.





Avez-vous essayé de transcrire, dans la musique, ce conflit intérieur dont vous parlez?


L’idée était dans un coin de ma tête. Beaucoup de choses se sont assemblées. Il y avait également le thème du festival, donc je devais écrire quelque chose pour cela ; c'était la commande.

Puis, j'ai eu l'idée d'une suite car, à ce moment-là, j'écoutais beaucoup le Concerto pour cordes, percussions et célesta de Bartók. J'ai acheté la partition et je l'ai étudiée. Je me suis aussi inspiré de A Love Supreme de John Coltrane. Ces deux pièces sont en quatre parties ; c’est de là que m’est venue la structure de Driving.

La première partie et le prélude, qui s'appelle Sunrise, sont très influencés par la première partie du concerto de Bartók. Je pense d’ailleurs que j'ai choisi le même tempo, Andante. Bartók utilise le procédé du canon; je suis parti de cette idée, et je suis ensuite allé dans quelque chose de totalement intuitif, avec une multitude d’idées différentes, mais avec tout un travail sur les tierces mineures.


Driving est donc le fruit d’un mélange de différentes sources?


Pour être précis, les idées se sont lentement rassemblées, ce qui arrive généralement quand je compose. J’étudie régulièrement les maîtres. Dans ce cas, c'était Bartók, Coltrane, mais également des compositions de Kurt Rosenwinkel, un guitariste de jazz.

Mon travail est toujours le résultat de mes idées personnelles, de l’étude des grands maîtres de la composition et de mes écoutes. Ce sont les trois influences principales.

La musique classique a-t-elle toujours un rôle dans votre processus de composition?


Je suis un musicien de jazz et mes compositions, bien qu’elles s’inspirent de divers styles, restent des pièces du répertoire jazz. Cela ne m’empêche pas d’écouter, d’apprécier, et de m’influencer de toutes sortes de musiques.

Côté classique, j’écoute principalement de la musique orchestrale, et surtout celle à partir du XXe siècle : Stravinsky, Bartók, Richard Strauss... Il y a notamment un livre très intéressant : The Rest is Noise, qui retrace l’histoire de la musique du XXe siècle, à partir de l’opéra Salomé de Strauss en 1905. J'ai eu beaucoup d'inspiration en étudiant tous ces compositeurs.

La nécessité de composer est-elle plus grande pour un musicien de jazz?


Très certainement. En tout cas quand on est leader d’une formation, ce qui est mon cas. Vous devez être capable d'exprimer, de présenter des compositions. C’est un peu une condition sine qua non pour former un groupe. Dans le cas contraire, vous seriez obligés de jouer uniquement de la musique existante, et en jazz, cela ne fonctionne pas.

Les organisateurs ne programment pas de groupes qui jouent uniquement des standards. Ils veulent présenter des musiques originales. Dans la musique classique, les nouvelles œuvres peuvent réfréner les organisateurs de concerts, mais dans le jazz, c’est tout l’opposé.

Propos recueillis par Sébastien Cayet


Swiss Jazz Orchestra & Christoph Irniger
Driving, Suite pour voix, vibraphone et Big Band

Le 12 juin 2025, 21h30 à l'Alhambra dans le cadre des Athénéennes

Egalement au programme de la soirée:
20h00, Christian-Pierre La Marca, Jean-Frédéric Neuburger, Xavier Gallais (musique classique et contemporaine, récitation)

23h00, Protons (dance et trans), Chez Jean-Luc

billets pour un concert ou pour toutes la soirée:
Informations, réservations:

https://www.lesatheneennes.ch/programme2025/je-12-juin/swiss-jazz-orchestra-christoph-irniger/

Les Athénénennes, du 4 au 14 juin 2025:
https://www.lesatheneennes.ch

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